vendredi 20 septembre 2024

Baleine, alephs et décombres : l’architexture Krasnarhorkai (Petits travaux pour un palais)

 

"Il y a des noms qui retiennent toujours l’attention, lorsqu’ils paraissent parmi la myriade brouillonne et confuse de livres qu’on appelle rentrée littéraire parce qu’ils sont la promesse jamais démentie d’une réussite, mais parce qu’ils sont synonymes de tentatives.

On sait, à les lire, qu’il ne s’agira pas d’une énième production littéraire d’un marché culturel qui s’épuise à ne produire que des copies et des produits standardisés, mais qu’il s’agit toujours d’un risque : on tente quelque chose, quelque chose de différent et qui prend un chemin inverse à ceux trop balisés par les pratiques courantes. Il n’est pas dit que ces tentatives soient toujours réussies, mais l’on est en droit de préférer qui tente et se rate à celui qui ne fait que reproduire les habituelles resucées dont trop souvent on se lasse. Car c’est la même chose, à toutes les rentrées le même refrain, les mêmes couplets criards sur les prétendus chefs d’œuvres qui ne trompent personne. Et toujours les mêmes batailles, à essayer de faire entendre les quelques textes qui surnagent, parce qu’ils n’appartiennent pas, justement, au marché de la production (il faut nourrir la machine littéraire, poursuivre sa carrière, donner aux « gens » l’onction du pain littéraire quand bien même sa farine n’est plus fraîche).

Petits travaux pour un palais appartient aux novellas de Krasznarhorkai, que le public français a fréquenté récemment avec Le Dernier Loup (Cambourakis, 2019). Il raconte l’histoire, à la première personne, d’Herman Melvill (sans le E de l’auteur de Moby Dick), bibliothécaire d’âge moyen à la New York Public Library, dont nous suivons les errances dans un Manhattan propice à la résurrection de fantasmes, en particulier ceux de Herman Melville (le vrai), Malcolm Lowry et de l’architecte Lebbeus Woods (trois figures existantes qui lui permettent de réfléchir à l’art, à la catastrophe, à la vacuité). Car notre bibliothécaire a un projet, celui d’une bibliothèque, mais une bibliothèque fermée dont on ne sait pas trop bien si elle est un cénotaphe, un monument ou un aleph inaccessible qui retiendrait ou repousserait l’univers. Le récit d’une seule phrase suit, dans les digressions discursives que permet l’élan de la confession, la pensée et la progression d’un projet jamais très éloigné de la folie." La suite sur diacritik.com

Laszlo Krasznahorkai, Petits travaux pour un palais, traduit du hongrois par Joëlle Dufeuilly, Cambourakis, 16€, septembre 2024.

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