Endre Rozsda, né le 18 novembre
1913 à Mohács et mort le 16 septembre 1999 à Paris 18e, est un
peintre, dessinateur et photographe franco-hongrois.
Dépassant
la distinction abstraction-figuration, sa peinture prend le temps
comme sujet essentiel
La
maison de Rozsda à Mohács.
Endre
Rozsda est né à Mohács, petite ville hongroise située sur les
rives du Danube. Issu d’une famille bourgeoise, il est le second
enfant d’Ernő Rosenthal et d’Olga Gomperz. Son père était
propriétaire d’une briqueterie. Sa mère était la descendante
d’une famille juive d’origine portugaise.
Les
expériences de son enfance ont déterminé toute son œuvre. Il a
mis au point une technique artistique qui lui a permis de créer à
partir de ses souvenirs un monde singulier, surréaliste : « De mes
souvenirs et de la lumière, je fais un tissu dense et je contemple
jusqu’à ce qu’il s’anime et me rende mon regard, et se dresse
en face de moi. C’est le temps que je veux saisir, ordonner,
évaluer. Le temps, l’oubli multicolore et lumineux ; des
jouissances et des souffrances, le temps fait ses perles. Autour, je
tresse le lierre de mes souvenirs. Je ne veux ni estimer, ni
expliquer mais comprendre. Je pose ma tête sur le temps et j’écoute
ce qu’il me dit. »
L'atelier
de Endre Rozsda au Bateau-Lavoir, célèbre cité d'artistes
parisienne.
Rozsda
a décidé tôt qu’au lieu de la carrière à laquelle le destinait
sa famille, il sera peintre. Il a acquis les rudiments du métier à
l’école des beaux-arts de Vilmos Aba-Novák. Sa première
exposition individuelle, organisée à la Galerie Tamás en 1936,
alors qu’il avait seulement 23 ans, eut un retentissement
considérable. Il fut loué par les critiques, le Musée des
Beaux-Arts de Budapest lui acheta un tableau. Dans un article
élogieux, le quotidien Az Est [« Le Soir »] nota à propos du
jeune peintre : « Rozsda surprend par l’ampleur de son talent. Peu
d’artistes ont su peindre des femmes âgées, des mendiantes, comme
il l’a fait. […] Sur quelques-uns de ses beaux tableaux, une
voile tissée de brume et de lumière amplifie la réalité jusqu’à
la transformer en une apparition quasi musicale. »
La
première période de Rozsda, qui le rattache au style
postimpressionniste hongrois, a pris brusquement fin sous l’effet
d’un concert de Béla Bartók. Malgré son succès, Rozsda a
compris en écoutant le compositeur que dans sa peinture, il n’avait
pas été jusque-là « contemporain de [s]oi-même ». En 1938, il
partit à Paris en compagnie du sculpteur Lajos Barta. Il y
poursuivit ses études à l’École du Louvre. Dans la capitale
française, il se lia d’amitié avec Árpád Szenes, Vieira da
Silva, et Françoise Gilot, la future compagne de Picasso, à qui il
donna des cours de peinture. Rozsda fit également connaissance avec
Max Ernst et Alberto Giacometti. Sa peinture changea totalement, elle
se rapprocha du surréalisme.
L’occupation
allemande le contraignit à retourner en 1943 à Budapest, c’est là
que son style surréaliste arriva à sa maturité (Amour sacré,
Amour profane, 1947, Musée des beaux-arts de Dijon).
Après
la fin de la Seconde Guerre mondiale, Rozsda a pris part à la
fondation du groupe d’artistes hongrois Európai Iskola [« École
Européenne »]. Il participa régulièrement aux expositions du
groupe. Selon l’historienne de l’art Krisztina Passuth, il a été
une des figures les plus marquantes de l’École Européenne4. Le
groupe s’est dissous en 1948, parce que le régime communiste
hongrois ne tolérait pas l’art abstrait et surréaliste. Au cours
des années suivantes, Rozsda a réalisé des illustrations de livre.
Il ne pouvait peindre que de manière clandestine, il était
naturellement hors de question qu’il expose ses œuvres.
À
la suite de l’écrasement de la révolution de 1956, Rozsda
s’installa définitivement en France. Il entra en relation avec
Raymond Queneau et André Breton, qui préfaça le catalogue de son
exposition organisée à la Galerie Furstenberg en 1957. Rozsda
participa à l’exposition internationale du surréalisme à Milan
en 1961. Il remporta en 1964 le prix Copley, dont le jury était
composé de Hans Arp, Roberto Matta, Max Ernst, Man Ray, Roland
Penrose, Herbert Read et Marcel Duchamp.
Au
cours des années 1960, la peinture de Rozsda a connu une nouvelle
transformation : de la tension ou de l’harmonie nées de
l’alternance de structures élaborées de manière architectonique
et de couleurs tourbillonnantes, il créa des microcosmes d’une
exceptionnelle richesse de détails. Son aspiration à « maîtriser
le temps » et dissoudre la réalité dans son imagination continuait
à se nourrir du surréalisme, mais si on considère son mode
d’expression, cette période doit déjà plutôt être classée
dans l’abstraction lyrique.
Péter
Esterházy et Endre Rozsda
Rozsda
a obtenu la nationalité française en 1970. Il installa en 1979 son
atelier au Bateau-Lavoir, où il travailla jusqu’à la fin de sa
vie.
La
dernière exposition à laquelle il a pu assister personnellement a
été ouverte en 1999 par l’écrivain Péter Esterházy dans la
Galerie Várfok à Budapest. « Tout comme la création elle-même,
ces tableaux ne se révèlent que difficilement. Il faut les regarder
longuement, silencieusement, s’y absorber (Que ne faut-il pas, par
ailleurs, traiter de la sorte…). Mais ces tableaux-ci parlent dès
le premier regard. Ils ne disent évidemment pas tous la même chose,
mais on dirait qu’ils possèdent une structure mélodique commune.
Et ce qu’ils ont en commun – il se peut que je me trompe, et
qu’une fois de plus, je sois le sujet unique et abusif de mes
propos – ce qu’ils ont en commun est passablement anachronique,
n’est pas conforme à leur époque : les tableaux de Rozsda
semblent dire que le monde est beau. Il se peut que ce soit cela, le
surréalisme. Le surréalisme est-il en fait une attitude éthique ?
», se demanda l’écrivain, ajoutant : « J’emballerais bien mes
livres dans ses toiles, ils s’y sentiraient très bien. »
Endre
Rozsda repose au cimetière Montmartre, à Paris.
Des
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Source
: lepartking.com