"Je parle français depuis plus de trente ans, je l'écris depuis vingt ans, mais je ne le connais toujours pas. Je ne le parle pas sans fautes, et je ne peux l'écrire qu'avec l'aide de dictionnaires fréquemment consultés. C'est pour cette raison que j'appelle la langue française une langue ennemie, elle aussi. Il y a encore une autre raison, et c'est la plus grave : cette langue est en train de tuer ma langue maternelle." L'analphabète - Récit autobiographique Agota Kristof p. 24 Editions ZOE Genève 2004 Lu sur la jaquette de ce livre : "Agota Kristof est née en 1935 en Hongrie, à Csikvand. Elle arrive en Suisse en 1956, où elle travaille en usine. Puis elle apprend le français et écrit pour le théâtre. En 1987, elle devient célèbre avec son premier roman, Le Grand Cahier, qui reçoit le prix du «Livre Européen». Deux autres livres suivent, La Preuve et Le Troisième Mensonge, une trilogie traduite dans près de quarante langues. L’enfance en temps de guerre et le déplacement dû à l’exil en sont les thèmes centraux. Son quatrième roman, Hier, publié en 1995, renouvelle sa recherche autour de l’identité." Les livres d'Agota Kristof sont écrits dans un style concis, dépouillé à l'extrême. Des phrases courtes.. comme si effectivement l'auteur se débattait avec une langue ennemie. Mais quelle puissance, quelle force dans cette écriture. Son écriture rend parfaitement l'extrême dureté des rapports humains en Hongrie pendant la période qui couvre la seconde guerre mondiale jusqu'à 1956. La trilogie évoquée ci-dessus "Le grand cahier", "La Preuve", "Le troisième mensonge" sont à lire absolument. Quand on les a pris en main ce sont des livres qu'on ne lâche plus.
Après avoir lu les romans d'Agota Kristof, il est particulièrement intéressant de lire son petit ouvrage autobiographique "L'analphabète". Il permet d'imaginer le travail de l'écrivain. On y perçoit comment elle transpose sur le plan littéraire, les matériaux de sa propre vie. Passionnant ! Ses romans ont été traduits en 40 langues. Je suppose qu'ils l'ont été aussi en hongrois et je me demandais si elle avait participé à la traduction et quel étrange sentiment elle a dû ressentir dans ce cas. Ce thème de la langue amputée est récurrent chez les auteurs exilés. Kundera, Márai, ...
samedi 1 avril 2006
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