photo : Illés Sarkantyu
Le conteur éternel, l'oracle de son temps est mort sans souffrir, dans son lit d'hôpital, en bavardant. Il a vécu presqu'un siècle, il est devenu historien polygraphe et il avait une connaissance extraordinaire – qu'il s'agisse d'histoire, de politique, de littérature, de musique classique ou d'arts - il comprenait le cours du monde mieux que quiconque. Il est né hongrois, démocrate mais deux guerres mondiales et deux dictatures politiques (fasciste et communiste) l'ont convaincu de rechercher une vie libre à Paris. Son coeur est ainsi devenu à moitié français. Il rêvait en français, son fils est né en France. On pouvait compter parmi ses amis Camus, Sartre, Simone de Beauvoir aussi bien que Attila József, Dezsõ Kosztolányi ou Lajos Hatvany et souvent des chefs d'État français et hongrois lui demandaient conseil encore récemment. Même ces derniers jours, cet intellectuel qui portait dans son coeur deux pays lisait la presse internationale en cinq langues (hongrois, français, anglais, italien et allemand), il était toujours au courant de l'actualité, toujours vif d'esprit. Il a écrit plus de 30 livres, jusqu'à la fin il travaillait sur son dernier livre et il était toujours amateur de musique, de femmes, de la levée du soleil et de la Vie. Il aimait mettre en contact les gens, créer, inspirer et être inspiré. Il était guidé par sa curiosité dans toute sa vie, jusqu'au dernier instant. Désormais, c'est à ses oeuvres, ses proches, ses disciples, ses admirateurs de le rendre immortel. François Fejtõ aurait fêté ses 99 ans le 31 août 2008.
François Fejtõ, écrivain, historien, journaliste et linguiste d'origine hongroise, spécialiste de renommée mondiale de l'Europe centrale et orientale, s'est éteint le 2 juin 2008 à Paris à l'âge de 98 ans. Chevalier de la légion d'honneur français, décoré de la Grande Croix de l'Ordre du Mérite de la République hongroise, il est l'auteur d'ouvrages de référence tels que L'Histoire des démocraties populaires, Budapest, l'Insurrection ou Voyage sentimental.
Né en 1909 en Hongrie, il a poursuivi ses études universitaires à Pécs et á Budapest. Après une brève période de militantisme communiste, qui lui a valu un an d'emprisonnement en 1932, il est devenu journaliste au quotidien social-démocrate Népszava. Fondateur et corédacteur entre 1935-1938 de la revue littéraire antifasciste Szép Szó avec le poète Attila József et le journaliste Pál Ignotus, il a été contraint de quitter le pays à cause d'un article critiquant la politique pro-allemande du gouvernement.
Après la Deuxième guerre mondiale qu'il a vécue en France, il a assuré la direction du bureau de presse à l'ambassade de Hongrie à Paris. Un poste dont il a démissionné en 1949, à la suite de l'arrestation de László Rajk, ministre des Affaires étrangères, victime d'un procès arbitraire. Pour protester contre le verdict injuste, il a rompu tout lien avec la Hongrie officielle et a démontré dans un article le caractère volontairement erroné des accusations.
En 1950, il a commencé à travailler à l'Agence française de presse (AFP) pour laquelle il a commenté, pendant presque trente ans, les événements du monde communiste. En 1955, il a acquis la nationalité française.
En 1956, il a joué un rôle primordial dans l'information des intellectuels français en leur fournissant des éléments authentiques sur les événements hongrois. La prise de position d'Albert Camus et d'autres a littéralement sauvé des vies lors des procès contre des écrivains en Hongrie et a marqué un tournant dans la perception occidentale des systèmes communistes.
Entre 1972 et 1982, il a dirigé un séminaire consacré à l'URSS et aux pays de l'Est à l'Institut d'Études Politiques de Paris.
Journaliste international, auteur de livres traduits en plusieurs langues, il n'est retourné en Hongrie qu'en 1989 pour assister aux funérailles officielles d'Imre Nagy, Premier ministre lors de la Révolution de 1956.
En érigeant en 1988 un monument au Père-Lachaise à la mémoire de cet homme politique exécuté deux ans après 1956 par le régime communiste, François Fejtõ et la Ligue Hongroise des Droits de l'Homme à Paris avaient largement contribué à sa réhabilitation.
Un événement important dont nous commémorons le 20e anniversaire ce mois de juin…
Une cérémonie funéraire sera organisée le 10 juin à 16 heures à l'Église Saint Sulpice à Paris en l'honneur de François Fejtõ. La même semaine le cercueil sera acheminé en Hongrie. La République de Hongrie rendra un hommage national à François Fejtõ. L'enterrement aura lieu au cimetière Fiumei.
Sources :
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