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Julie Biro
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Même
si les sujets « sérieux » me taraudent, je v(n)ous offre
trois blagues comme cadeau et aussi comme encouragement. Commençons
l’année en riant, ne devenons pas,
malgré l’ambiance générale, des agélastes
détestés par Rabelais,
ceux qui ne rient pas, qui n'ont pas le sens de l'humour.
D’abord
voici l’histoire véridique d’un pauvre pêcheur de
Czernowitz-Cernǎuti-Tchernovtsy-Tchernivtsi-Czerniowce-Chermivtsy
(l’Empire austro-hongrois n’était pas seulement
bicéphale, il était aussi polyglotte) qui, en été 1914, attrape
sur
le Prut dans
son filet un poisson magnifique, reluisant, scintillant, sautillant.
À l’instant où le pêcheur, enchanté, veut mettre la proie
exceptionnelle dans sa besace, oh stupéfaction, oh terreur, le
splendide habitant des eaux se met à parler. Le pêcheur aurait lu
les contes où les poissons parlent, il aurait
été moins surpris en entendant le poisson enchanté lui dire que
s’il le remettait à l’eau, il pourrait faire trois vœux qui
seraient immédiatement exaucés. Et si le bonhomme avait connu la
fin des
contes, il se serait bien gardé d’obtempérer. Sa stupeur passée,
il a donc demandé, évidemment, le malheureux, comme tous les
pauvres pêcheurs des contes, comme tout le monde : la richesse,
l’amour et le pouvoir. Un gros sac d’or avec un palais sur le
Ring à Vienne, une belle femme et la place non pas de l’Empereur,
quand même pas, il aimait, à l’instar de tous les citoyens de
l’Empire, son vieux François-Joseph, mais la place de l’héritier
du trône.
Comme
tous les pêcheurs de tous les contes, le nôtre, à la nationalité
trop compliquée pour être comprise de quiconque, obtint, lui aussi,
tout ce qu’il souhaitait. Et c’est déjà dans son magnifique
palais, dans une chambre à coucher rutilante d’or, de soie et de
brocart, dans un lit à baldaquin, que le pauvre pêcheur se coucha
le soir même à côté de Sophie Marie Joséphine Albine Chotek von
Chotkow.
Le
lendemain matin, l’archiduchesse et le tout récent archiduc furent
tirés de leur nuit d’amour par le grand chambellan.
— Pardonnez-moi
Altesses de vous réveiller, mais le train pour Illisze part dans une
heure, et vous ne devez pas le manquer, car de là vous vous rendrez
à Sarajevo.
*
Ensuite,
puisqu’elles sont les meilleures, une blague juive. Une vraie.
C’est mon copain G. de Londres qui me l’a racontée.
Les
membres de l’équipe juive d’aviron de Londres, se sentant assez
forts, lancent un défi à l’équipe de Cambridge, championne
d’Angleterre. Vous connaissez tous ce sport : un barreur assis
au bout du bateau appelé outrigger
dicte le rythme par un porte-voix aux autres membres de l’équipe
qui rament.
Les
fellows
de Cambridge acceptent le challenge,
se rendent à Londres. La compétition a lieu sur la Tamise — une
minute après le départ, l’équipe de Cambridge a déjà cent
mètres d’avance. Et elle gagne, bien entendu.
— Nous
avons visé trop haut. Nous devons nous mesurer à une équipe moins
forte, disent les jeunes juifs londoniens. Et ils s’adressent aux
membres de l’équipe de l’université d’Oxford.
Le
team d’Oxford
accepte le challenge,
se rend à Londres. La compétition a encore lieu sur la Tamise —
cette fois il faut deux minutes après le départ, pour que l’équipe
d’Oxford ait cent mètres d’avance. Elle gagne aussi, évidemment.
L’équipe
juive, dépitée, décide d’envoyer un espion à Cambridge. Qu’il
s’inscrive dans le club d’aviron, observe tout et revienne avec
ses observations.
— Où
est la faute, que faisons-nous mal, quel est le truc des autres
équipes ?
L’espion
revient trois mois plus tard, avec une explication claire, s’appuyant
sur ce qu’il a pu voir et apprendre.
— J’ai
compris. Je sais pourquoi ils nous battent. Chez eux, dans l’équipe
de Cambridge, il n’y a qu’un seul qui parle.
*
Mais
revenons à l’Histoire. D’ailleurs : où s’arrête le
passé, où commence le présent ? L’histoire qui suit est
aussi authentique.
Deux
scientifiques de feu l’Union soviétique, envoyés à Paris à un
congrès, jouent, entre deux séances, au loto… et gagnent !
Un million trois cent mille francs ! Munis du chèque magique,
miraculeux, incroyable, ils se précipitent dans une banque où ils
demandent :
— Dites,
s’il vous plaît, combien de francs pouvons-nous retirer à la fois
de cette somme et à quels intervalles ?
L’employé,
un peu éberlué, leur répond :
— Mais
enfin, c’est votre argent, vous en faites ce que vous voulez !
Si vous le mettez sur un compte chez nous, vous pouvez retirer même
la totalité si ça vous chante !
Ainsi
fut fait. Les nouveaux millionnaires se précipitent chez un
concessionnaire Renault où ils demandent :
— Dites,
s’il vous plaît, si nous vous passons une commande aujourd’hui
pour une voiture que nous réglons immédiatement et intégralement,
combien d’années faudrait-il attendre pour la livraison ?
Le
vendeur, un peu éberlué, leur répond :
— Mais
enfin, vous choisissez la voiture qui vous convient, vous la payez et
vous partez !
Ainsi
fut fait. Installés dans leur voiture flambant neuve, les deux
savants se précipitent à la Préfecture de police où ils
demandent :
— Nous
aimerions nous rendre à Marseille. Dites, s’il vous plaît, à
quel guichet devons-nous nous adresser pour demander l’autorisation,
dans combien de temps pouvons-nous revenir pour la retirer, et à
quel guichet nous indiquera-t-on l’itinéraire précis que nous
devrons suivre ?
Le
préposé aux informations, un peu éberlué, leur répond :
— Mais
enfin, si vous avez un permis de conduire valable, vous allez où et
quand ça vous chante !
Les
deux scientifiques soviétiques sortent lentement dans la rue, se
regardent et l’un dit :
— Ça,
c’est bien les Français, toujours indisciplinés. Quand je pense
que ça va faire bientôt deux cents ans que ces incapables ont fait
leur révolution, et ils n’ont toujours pas réussi à mettre de
l’ordre dans leur pays.
*
J’en
connais d’autres. Je vous les réserve pour janvier 2016.
En
attendant, BUÉK ! (Abréviation finno-ougrienne pour souhaiter
une nouvelle année heureuse.)
adam
biro
janvier
2015
biroadam4(AT)gmail.com
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