Je
me sens saturée d'images et de commentaires. Depuis mercredi midi, j'ai
du mal à quitter les écrans, les ondes de radio. Des vagues d'émotions
me submergent, positives et négatives; elles me mettent en état de
sidération d'abord, puis, peu à peu, je parviens à émerger, à
respirer...
Habituellement,
je me méfie des emballements massifs d'émotions collectives, je préfère
les vivre en profondeur, analysant sans cesse leur signification. Elles
arrivent comme une déferlante, submergeant les foules en état de
sidération. La foule s'amplifie à la mesure du traumatisme subi et il
fait chaud d'y plonger: elle réconforte et décuple les émotions
collectives.
Dimanche
après-midi, nous l'avons vécue, même par procuration, cette libération
par un même mouvement massif, du jamais vu par son ampleur et par son
unité. Même la mémorable effusion de joie de la Coupe du Monde en 1998 a
été battue! Chaque personne semblait être consciente de l'importance du
moment: celui de l'Histoire en marche.
Tout
s'est organisé très vite et sans doute, c'est dans son côté “improvisé
sur le vif” que réside le secret de son succès. Sous le coup de
l'intense stupeur, de révolte, près de 50 chefs d'état (dont “notre”
Viktor, qu'il en prenne de la graine!) se sont réunis en un record de
temps. Parmi eux, certains ne sont pas des modèles de démocrates. Peu
importe, c’est le Symbole qui compte, celui de la cohésion devant la
menace du terrorisme. La foule, immense, sans étiquette d'autre que le
désir commun de rendre hommage aux victimes et aux forces de l'ordre
(acclamation stupéfiante des CRS!), et de prendre conscience de son
attachement à la liberté et à la solidarité, défile interminablement et
dans le calme. Impressionnant! On aimerait y être.
Il
ne faut pas laisser retomber cette émotion collective. Le temps de
l'analyse lucide des évènements et la prise rapide et efficace des
décisions arrive. On se souvient de ce que sont devenues les embrassades
bleu-blanc-rouge de 1998 en peu de temps!...
Surtout, il ne suffira pas de traiter les symptômes, connus depuis longtemps. Il faudra s'attaquer aux causes de la maladie.
N'empêche, cet après-midi, j'ai été particulièrement fière de ma carte d'identité française.
Rozsa Tatar
Rozsa Millet
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