"Avec David Marton, Dalbavie fait du roman de Krasznahorkai une expérience scénico-musicale singulière.
Un même roman contemporain adapté deux fois en moins d'un an à l'opéra, c'est sans doute un cas unique. En décembre 2023, le dernier opéra de Peter Eötvös, Valuschka, était créé à Budapest avant d'être traduit en allemand à Ratisbonne ; en ce début d'été, c'est à Berlin que La mélancolie de la résistance de László Krasznahorkai retrouve la scène lyrique, sous la forme d'un « opéra avec film » mis en musique par Marc-André Dalbavie, en français et avec deux grands chanteurs français en haut de l'affiche. L'opéra d'Eötvös semblait enchaîner les épisodes sans parvenir à rendre compte du sens et de l'atmosphère trouble du roman, publié en 1989 et nourri de la décomposition du monde soviétique ; celui de Dalbavie, qui commence en douceur et ne déploie sa séduction que progressivement, est beaucoup plus parlant et émouvant.
Le spectacle se passe à la fois à la scène et à l'écran, sous forme de
film réalisé en direct sur des décors qui n'apparaissent
qu'exceptionnellement sur le devant de la scène. La musique elle-même
commence par se faire discrète : le cinéma est à vrai dire un bon moyen
pour rendre compte de la profusion du roman de Krasznahorkai, déjà
adapté à l'écran par Béla Tarr sous le titre Les Harmonies Werckmeister, qui est celui de la partie centrale du roman. Le film-opéra proposé par David Marton
n'a pas la puissance hypnotique des images austères de Tarr, mais il
présente les personnages et une partie de l'histoire, souvent par
l'image seule, de manière plus concise que ne saurait le faire le seul
opéra – et que ne l'avait fait Eötvös. Les chanteurs sont sonorisés tout
au long de la soirée, ce qui était sans doute nécessaire pour leur
permettre d'être audibles quand ils sont filmés en arrière-scène autant
que quand ils sont directement visibles. Cela fait un peu oublier
l'orchestre qui tend à n'être qu'un accompagnement, pour soutenir les
chanteurs ou pour souligner les épisodes des nombreuses scènes muettes
sur l'écran ; il n'est vraiment au premier plan que pour une
transcription un peu boursouflée de la 4e fugue du Clavier bien tempéré de Bach." La suite sur resmusica.com
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