Ce
douzième billet d'humeur est aussi un anniversaire. Cela fait un an que
j'ai répondu à l'aimable invitation de Jean-Pierre Frommer qui m'avait
proposé d'agrémenter les pages des Mardis hongrois de ces « billets d'humeur » libres et informels, comme ça vient, à mon rythme.
Un
défi intéressant : le français, je l'ai appris au lycée comme deuxième
langue, à trois maigres heures par semaine, avec une prof très gentille
mais manifestement mal à l'aise et morte de peur d'être prise en défaut
par des élèves qui avanceraient plus vite qu'elle... Ensuite, j'ai
obtenu, à la fac de Szeged, un diplôme de professeur de russe et de
français, et j'ai enseigné deux ans sans jamais avoir mis le pied en
France. Le vrai apprentissage du français a commencé pour moi par amour,
avec amis et belle-famille, et surtout, avec un mari écrivain. Et cet
apprentissage ne s'arrêtera probablement jamais...
Langue
étrangère, langue maternelle, bilinguisme (ou plus)... Pour moi, c'est
un destin de caméléon. Je ne suis pas tout à fait la même personne
lorsque je « vis » en français, que celle qui regagne la langue de ses
25 premières années... Je lis Màrai, inconsolable de la perte, à
cinquante ans, du pays et de la langue maternelle qui demeure pour lui
la langue exclusive de l'écriture. Agota Kristof appelle le français «
langue ennemie » qui détruirait petit à petit le hongrois, sa langue
maternelle. Elsa Triolet, premier prix Goncourt féminin, s'est approprié
le français à la perfection, au point de se poser la question : « Être
bilingue, c'est un peu comme d'être bigame : mais quel est celui que je
trompe ? »
Pour
moi, les langues sont des horizons nouveaux, enrichissement, ouverture,
plages de liberté... Nouvelles langues, nouvelles amours, passionnées
ou tièdes...
Et
la langue maternelle dans tout cela ? C'est l'initiation primordiale,
hiéroglyphes mystérieux inscrits dans les gènes, ineffaçables. Comme
notre attachement indestructible à notre mère.
Flora
Le blog de Flora en français
Il paraît que le mot traducteur a la même racine que le mot traître?Comme vous le disiez si justement
RépondreSupprimer"Être bilingue, c'est un peu comme d'être bigame : mais quel est celui que je trompe ?"
c'est être aussi un pont entre deux cultures entre deux mondes , c'est faire le lien entre des êtres qui ne se comprennent pas... béni soient les bilingues! : Ils sont le trait d'union entre les peuples!
Merci
Bonsoir, Stéphanie, merci de vous être arrêtée sur mon billet. En effet, le pont est un de mes symboles préférés! Aller et venir d'une langue à l'autre, c'est pénétrer l'intimité des peuples, créer des liens - et s'enrichir immodérément, même si cette richesse ne se trouve pas au fond des coffres-forts!
SupprimerBonjour Stephanie, en effet, le bilinguisme c'est comme appartenir à deux mondes simultanément, il y a une étrangeté intrinsèque à cet état.
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