A 16 h 30, une bonne partie de Budapest
s’est subitement figée. C’est par une minute de silence et un carillon
de cloches que les Hongrois ont commémoré, jeudi 4 juin, les 100 ans du
traité de Trianon. Signé en 1920 dans l’annexe du château de Versailles,
ce traité, signé après la défaite de l’Empire austro-hongrois, pendant
la première guerre mondiale, a privé la Hongrie des deux tiers de son
territoire pour l’attribuer à ses voisins. Cent ans plus tard, Trianon
reste synonyme de tragédie pour une grande majorité des Hongrois, et
Viktor Orban avait prévu de faire de 2020 une année de commémoration.
Mais le Covid-19 est venu troubler les plans du premier ministre
nationaliste.
Face à l’épidémie, le gouvernement a en effet annulé la quasi-totalité des
événements. C’est finalement le maire d’opposition de Budapest qui a
pris, à la surprise générale, l’initiative d’organiser une minute de
silence en demandant à tous les transports en commun de s’arrêter.
« Il y a cent ans, le droit à l’autodétermination a été foulé du pied
et, nous, les Hongrois, nous ne pouvons que ressentir une douleur
profonde à ce sujet », a expliqué Gergely Karacsony, un écologiste élu en octobre 2019 à la tête d’une coalition regroupant toute l’opposition. « Pour
pouvoir sortir de l’ombre de Trianon, il faut d’abord faire face à nos
mauvaises décisions, non pas en cachant les blessures du passé, mais en
saisissant les possibilités d’avenir », a-t-il déclaré, dans une formule assez vague pour permettre à chacun de comprendre ce qui l’arrange.
« Frontières spirituelles »
« Frontières spirituelles »
Le Fidesz, le parti de Viktor Orban, reproche d’habitude à la gauche
hongroise de ne pas commémorer suffisamment ce traité, qui a conduit à
laisser 3 millions de Hongrois en dehors de ses frontières. Cent ans
plus tard, on estime qu’encore 2 millions de Hongrois se répartissent
entre la Roumanie, la Slovaquie, l’Ukraine, la Serbie, la Slovénie et
l’Autriche. Ces populations sont choyées par M. Orban, qui leur a
distribué des passeports depuis son élection en 2010. En retour,
celles-ci votent massivement pour le Fidesz. Mais le premier ministre
est étonnamment resté silencieux jeudi, se contentant simplement
d’approuver l’initiative du maire de Budapest.
Au cours d’une séance commémorative du Parlement, c’est Janos Ader, le
président hongrois, également membre du Fidesz, qui s’est chargé de
fustiger un traité « injuste », « qui n’a pas apporté la paix » et « qui a détruit le développement économique de la Hongrie ». S’il a assuré que « les frontières spirituelles de la Hongrie ne changeront jamais », il a toutefois souligné que « la Hongrie n’a jamais demandé un changement des frontières », un sujet potentiellement explosif chez les voisins. « Le gouvernement a voulu visiblement éviter toute tension internationale, estime ainsi Gabor Egry, directeur de l’institut d’histoire politique. Il a juste placardé des affiches visuellement monstrueuses et publié des vidéos débarrassées de toute référence historique, comme une montrant deux jeunes jouer au foot des deux côtés de la frontière ».
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