mardi 15 mars 2011

Le chercheur de traces au Théâtre Berthelot de Montreuil du 30 mars au 9 avril 2011


mise en scène : Bernard Bloch
création 2011
le réseau (théâtre) reseau.theatre@wanadoo.fr
10 rue édouard vaillant 93100 montreuil 01 42 87 39 20

avec
Xavier Béja : le Narrateur
Philippe Dormoy : l'Envoyé
Evelyne Pelletier : l'Epouse & autres figures
Jacques Pieiller : Hermann & autres figures

dramaturgie Isabelle Rèbre, assistante à la mise en scène Pauline Ringeade, scénographie
Didier Payen, images Dominique Aru, costumes Laurence Forbin, musique originale Philippe Hersant, création lumière Luc Jenny, création sonore Thomas Carpentier et Mikaël Kandelman, régie générale Marc Tuleu


L’envoyé : L'effacement des traces est l’une des
manoeuvres préférées de l'adversaire.

Hermann : Quel adversaire ? …

L’envoyé : Je pensais au Temps…! C’est de loin
l’adversaire le plus redoutable.

Imre Kertész, Le chercheur de traces, Actes Sud




« Comme je suis un artiste, le destin a peut-être bien fait de me mener à Weimar, plus précisément à Buchenwald : finalement, il est plus vertueux d’apprendre par sa propre souffrance que par celle des autres. (……) Quelque seize ans plus tard, c’est un homme adulte qui est revenu dans cette ville pour procéder à une inspection des lieux. Cet homme – moi, en l’occurrence - qui savait précisément ce qu’il cherchait n’a rien trouvé. Ni le restaurant, ni le carrefour. Et surtout il ne s’est pas retrouvé lui-même, sujet et objet d’un instant vécu. Il a erré comme un étranger dans des lieux inconnus où il s’est perdu comme dans un palais des glaces. Il s’est arrêté au sommet d’une colline, s’attendant à ce que la vision qui s’offrirait à lui le bouleverse et le terrasse. Mais c’était un simple flanc de colline dénudé, couvert d’herbe et de fleurs des champs, qui s’étalait devant ses yeux.
Alors, il a compris ce qu’on appelle l’évanescence des choses, il a compris à quel point tout ce
qu’elle pouvait lui faire perdre lui était cher. Cela a déterminé sa vie – c’est à dire la mienne. J’ai
compris que, si je voulais affronter les lieux qui changent et ce moi qui s’estompe, je devais tout
recréer… »
Imre Kertész, Weimar visible et invisible, in L'Holocauste comme culture Actes Sud, 2009

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Un homme revient, vingt ans après, sur les lieux où se sont déroulés d’indicibles crimes.
Toute trace a disparu et il ne retrouve rien des sensations qu’il y avait vécues : les choses ne
rendent pas de compte…
La civilisation occidentale est née avec les Dix Commandements et la Tragédie grecque, elle a
connu son apogée au Siècle des Lumières. La Shoah et ses divers avatars ont causé à cette
civilisation une blessure irréparable.
Le texte d’Imre Kertész (Prix Nobel de littérature 2002), ici adapté pour le théâtre, n’est pas
un témoignage de plus sur la Shoah. Il s’agit ici, par la littérature, de donner un sens à la
survie : celle de l’espèce humaine comme celle des individus.
Pour Imre Kertész, être sans destin déporté à Auschwitz à l’âge de 14 ans, puis écrivain de
l’ombre dans la Hongrie stalinienne, il s’agissait de passer du statut de survivant à celui de
témoin, puis à celui d’écrivain, donc de sujet. Selon lui, l’art seul peut nous permettre, en
réinventant une nouvelle mythologie, de reconstruire un destin pour l’humanité. Un destin qui
se fonde sur la prise à bras le corps de ce qui s’est réellement passé, sans se vautrer dans
une sidération/fascination compassionnelle et stérile.
Imre Kertész ouvre la voie au soulèvement.
Bernard Bloch, janvier 2010

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