Afin de ne pas
succomber à la tristesse qui suit les grandes réjouissances…
Halte : ce n’est pas ce que dit mon poète polonais préféré,
Guillaume Apollinaire, pour qui « la joie venait toujours après
la peine… », ce qui laisserait supposer qu’il n’était
pas très polonais, et peut-être même pas d’Europe centrale,
allez savoir... Je recommence : la grande fête
œcuménico-gastronomico-financière est derrière nous et de grandes
festivités politiques nous attendent, je parle du réveillon du
Nouvel An et des différentes réjouissances électorales. Assez
importantes en France ; capitale en Hongrie (l’occasion de
faire tomber un régime honteux, car s’il ne tombe pas, on peut se
demander s’il y aura encore des élections). Je vous offre donc,
comme il y a un an, trois blagues.
La première est
très chrétienne.
Un homme cherche à
se garer désespérément. (Rien n'est
moins chrétien que le désespoir…) Pas de place libre ; même
les places interdites sont occupées.
Notre homme est très
pressé. Il a un rendez-vous superimportant à midi, et il est midi
moins cinq. Il tourne autour du pâté de maison, il serait prêt à
se garer même sur le trottoir. (Ici, une réflexion s’imposerait
sur Calvin, le libre arbitre, la grâce suffisante et la grâce
efficace…)
—Seigneur,
aide-moi. J’irai à la messe tous les dimanches, c’est promis.
Trouve-moi une place, fais partir quelqu’un (ce n’est pas très
chrétien non plus, mais passons…), je t’en supplie.
Il roule lentement,
accompagné d’un concert de klaxons — il n’en a cure (pas
chrétien du tout).
—Je ferai un don
au Secours catholique. Un don important. Et un autre au CCFD. Mon
Dieu, accorde-moi une place de parking. Je ne te demande pas
grand’chose.
Rien. Le temps
passe. Il est midi.
—Je ferai une
retraite chez les trappistes. Dans le silence. En priant toute la
journée. C’est mon rendez-vous de l’année, si je le rate… Je
n’ai pas à t’expliquer, tu le sais, puisque tu sais tout.
Conduis-moi à une place libre, je t’en supplie, et je…
En ce moment, tout
d’un coup, notre homme aperçoit un emplacement qui vient de se
libérer et il s’y gare immédiatement.
—Ça va, laisse
tomber.— Et il regarde vers le haut, un peu de biais. —Je me suis
débrouillé tout seul.
*
La deuxième et une
blague juive.
Deux hommes se
rencontrent dans la voiture-bar d’un train français. Ici, nous
sommes loin de la fête gastronomique. Nous sommes dans l’épaisseur
de la malbouffe honteuse. Laissez-moi rêver des wagons-restaurants
du passé. Avec nappe, vase de fleurs au milieu de la table,
quotidiens à votre disposition, jolie voyageuse en face de vous. Par
hasard. Les genoux se touchent. « Oh ! Excusez-moi !
». Et les mets sont succulents. « Pas de congelés ! » m’a dit
un jour fièrement le garçon. « Tout est frais et fait à la
demande.» Avec un cuisinier de métier, un garçon à votre service
et un autre pour encaisser, ces wagons-restaurants ne pouvaient
évidemment pas être rentables. La SNCF, comme les maternelles, le
Collège de France ou les prisons, doit gagner de l’argent, dégager
des marges. Depuis belle lurette, elle a remplacé les
wagons-restaurants à nappe blanche, vase au milieu de la table,
mystérieuses voyageuses et repas délicieux par des voitures-bars
déprimants, au design ringard, qui vous proposent des
sandwichs-éponges, des hot-dogs micro-ondes et des mini-bouteilles
de bordeaux congelées… et comme voisins de comptoir des managers
pas mystérieux, quoi, des managers ;
tout est dit.
Passons.
Le premier homme,
élégant, avantageux, s’écrie en voyant l’autre :
—Lévy ! Ça
fait un…
L’autre
l’interrompt, essaie de l’interrompre :
—Mais je…
—Laisse-moi au
moins finir ma phrase s’il te plaît. Ça fait un bail que je ne
t’ai pas vu, alors…. Comment vas-tu ? Je te trouve changé.
Qu’as-tu fait de tes beaux cheveux ? Tu es devenu presque
chauve. Et c’est quoi, ces lunettes épaisses ? Tu n’as
jamais porté de lunettes mon cher Lévy, que je sache ! Mais
comme tu as changé !
—Mais…- dit
l’autre homme.
—Et on dirait que
tu as rapetissé. Tu étais un bel homme, presque athlétique, et là,
tu te tiens mal, courbé, le ventre en avant… Et même ta voix…
je ne comprends pas, tu as vraiment changé…
—Mais enfin,
Monsieur, je ne m’appelle pas Lévy !— réussit enfin à
placer un mot le pauvre homme ainsi agressé.
—Ah, parce que tu
as aussi changé ton nom ?
*
Et enfin une blague
sans confession. Une que tout le monde pourrait endosser. Surtout en
Europe de l’Est. Ou centrale, si vous préférez. C’est de là
que je l’ai importée.
C’est l’histoire
préférée d’un de mes amis, qui ne vient pourtant pas d’Europe
de l’Est. Il se reconnaîtra. Et comme il est né un 1er
janvier, je la lui offre en cadeau, en lui souhaitant bon
anniversaire.
Deux hommes se
rencontrent dans la rue. À Prague, disons. Ou à Budapest. Le
premier, élégant, avantageux, en croisant l’autre, s’écrie :
—Tiens,
Dupontovitch ! Ça fait un bail qu’on ne s’est pas vus !
Écoute, là, je suis très pressé, on se verra plus longuement un
de ces jours, on s’appelle, mais dis-moi en un mot, comment tu
vas ?
—Bien— répond
Dupontovitch.
—C’est un peu
court, dis-moi quand même deux mots, je ne suis pas pressé à ce
point, nous ne nous sommes pas vus depuis une éternité…
—Pas bien.
Et je termine avec
les mêmes mots qu’il y a un an : Vous me direz, cette
histoire pourrait se passer à Paris, à New York. Si je la situe en
Europe de l’Est, c’est à cause de l’accent.
Je vous
souhaite une excellente année 2014 !
adam biro
janvier
2014
biroadam4(AT)gmail.com
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