L’un des plus grands écrivains hongrois,
Sandor Marai (1900-1989), idole des lettres magyares qu’on reconnaissait
dans les rues de Budapest, finit par être dégoûté de sa patrie qu’il
quitta en 1947 pour l’Europe de l’Ouest, puis pour les Etats-Unis, où il
devait se donner la mort. Les premières années de son monumental Journal, qu’il
a tenu de 1943 à son décès (dix-huit tomes en tout) documentent
magnifiquement cet écœurement. Le voilà pour la première fois traduit en
français, dans une riche sélection qui couvre les années de guerre et
la préparation à l’exil. Sans doute Marai est-il devenu diariste dans le
but de marquer les étapes de cette déprise, tant le genre du journal
porte son auteur à la plainte et à l’élégie… Celui-ci en publia
d’ailleurs des portions de son vivant, préalablement expurgées, ayant
pleinement conscience que ses notes étaient destinées, tout ou partie, à
la lecture d’autrui. La finesse des observations, la beauté
exceptionnelle des descriptions, les morceaux de bravoure en font une
œuvre à part entière, peut-être la plus importante qu’il ait laissée.
Horrifié par le déchaînement d’antisémitisme meurtrier
Comme son contemporain, le Roumain Mihail Sebastian (1907-1945 ; Journal (1935-1944), Stock,
1998), Sandor Marai s’inscrit dans cette élite morale dont ni l’esprit
démocratique ni la décence n’ont été altérés par le fascisme, la
violence du temps et l’inversion des valeurs due à la guerre. Marié à
une juive, Lola, dont le père sera assassiné à Auschwitz malgré ses
interventions, il est horrifié par le déchaînement d’antisémitisme
meurtrier qui va saisir la Hongrie, surtout après l’invasion allemande
de 1944, et par la participation active des gendarmes et de la
population hongroise à la déportation et au pillage, amenant ce
chroniqueur et journaliste prolifique à se replier dans un silence
volontaire." La suite sur lemonde.fr (article payant)
« Journal. Les années hongroises
1943-1948 » (A teljes naplo), de Sandor Marai, traduit du hongrois par
Catherine Fay et Andras Kanyadi, Albin Michel, 528 p., 25 €.
..."La finesse des observations, la beauté exceptionnelle des descriptions, les morceaux de bravoure en font une œuvre à part entière, peut-être la plus importante qu’il ait laissée." C'est aussi mon avis!
RépondreSupprimer