dimanche 29 novembre 2020

Magda Szabo, Audur Ava Olafsdottir : la chronique « poches » de Véronique Ovaldé

"L’œuvre de Magda Szabo est marquée par la sauvagerie. Le Faon en est la magistrale expression. Ce roman dit l’inconsolable peine du déclassement (Eszter est la fille d’aristocrates intellectuels déchus qui rêve de « cuisine parfumée au saindoux »), il dit la compromission (enfant, elle supporte les caresses de sa tante « comme une petite putain »), il dit l’amour fou et vandale, il dit surtout la redoutable immortalité de la jalousie. Parce que Eszter est, depuis toujours, consumée par la jalousie. Même maintenant qu’elle est une comédienne adulée, elle nourrit pour Angela une haine sans pareille. Elles se connaissent depuis l’enfance. Angela n’est que fragilité, beauté et innocence. Ce qui est une protection exemplaire contre le désarroi et la peur. Tout le monde aime Angela, « on écartait jusqu’aux cailloux sur son chemin ». Elle s’occupe des orphelins en ces temps d’avènement d’un monde de brigands – le communisme hongrois des années 1950. Et surtout elle est l’épouse de l’amant d’Eszter. Le Faon est un grand récit d’expiation, une confession pleine de rage et de détresse, admirable d’exigence et de lucidité : « J’ai ri du monstre que j’étais. » Ce sont les allers-retours d’une pensée de la destruction : le frottement passé-présent crée des étincelles et tout pourrait bien cramer. En lisant Le Faon, je pense à Magda Szabo elle-même, qui décida de ne jamais avoir d’enfant pour ne pas risquer de donner prise à l’oppresseur. Je suis impressionnée par sa radicalité. C’était peut-être le genre de femme, comme Eszter, à aimer mieux le cadavre de l’autre plutôt que son absence." La suite sur lemonde.fr (article payant)

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