Comme le mouvement, la peinture se
démontre parfois en marchant. C’était le cas pour l’artiste Judit Reigl,
morte jeudi 6 août, à Marcoussis (Essonne), à l’âge de 97 ans. Née le 1er mai 1923
à Kapuvar (Hongrie), elle a suivi l’enseignement de l’Académie des
beaux-arts de Budapest, où elle avait notamment pour condisciple le
peintre Simon Hantaï.
Après un voyage d’étude en Italie entre 1946 et 1948, les autorités hongroises lui confisquent son passeport. « Le système politique [prônait] le réalisme socialiste (…), les portraits de Staline… »,
se souvenait-elle en 2009, dans un entretien accordé à l’ancien
conservateur du MNAM-Centre Pompidou Jean-Paul Ameline, l’un des
meilleurs connaisseurs de son œuvre, pour le magazine Art in America.
« Automatisme total, global »
Judit
Reigl commence donc sa longue marche, en fuyant son pays à pied. Elle
échoue huit fois, la neuvième tentative est la bonne. Judit Reigl était
obstinée. Elle arrive à Paris en 1950. Hantaï, qui l’a précédée, la
présente à André Breton : il l’expose en 1954 dans la galerie L’Etoile
scellée, qu’il anime. Elle fréquente les réunions du groupe surréaliste,
mais se sent en porte-à-faux : la plupart des artistes privilégient la
figure, quand l’écriture automatique, qu’elle a découverte avec eux, la
conduit vers l’abstraction. « L’automatisme que j’ai pratiqué était
total, global. Mais les surréalistes, dans leur majorité, étaient
revenus vers l’imagerie », confiait-elle à Jean-Paul Ameline.
Sa
pratique est alors dans la mouvance de l’abstraction lyrique, ou
gestuelle. Elle expose dans certaines des galeries les plus en vue de
l’époque, comme René Drouin, puis Jean Fournier, ou encore Van Loo à
Munich. Chez le premier, elle rencontre Georges Mathieu, dont la
technique correspond à ce qu’elle-même cherche : « Il s’agissait de
peindre sur des grands formats avec tout le corps, en privilégiant la
vitesse d’exécution et sans avoir une conception préalable de l’œuvre à
peindre. »
Judit Reigl travaille alors « sans
aucun dessin préparatoire ni pinceau : avec les deux mains, en marchant
vers la toile, parfois en jetant la peinture à distance ». La série, sa première, est intitulée « Eclatements ». « Cela
correspondait aussi à l’éclatement du surréalisme et coïncidait
étrangement avec le début de l’insurrection hongroise d’octobre 1956 à
Budapest », remarquait-elle." La suite sur lemonde.fr (article payant)
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