"Le « Journal » de Sandor Marai vient de recevoir le prix Clarens du journal intime. Une immersion poignante dans la Budapest des années de guerre.
« Budapest est en train de périr ces jours-ci. » Nous sommes en 1945,
l'occupation allemande est sur le point de prendre fin. L'homme qui
trace ces mots désespérés est Sandor Marai,
et il a traversé toute la guerre dans la capitale. Peu après, il ira
récupérer quelques livres dans les décombres de sa maison. Le prix Clarens du journal intime,
dont il s'agit de la première édition, a vocation à couronner chaque
année un journal intime publié dans l'année, avec une attention
particulière portée à l'héritage humaniste. Ce dernier vibre dans chaque
ligne de Marai, exceptionnel témoin de son temps, pour ce premier
volume paru en français de son Journal. L'écrivain raconte
Budapest sous les bombes, l'occupation nazie, puis l'arrivée des
communistes. Et, avec indignation et désespoir, les persécutions contre
la communauté juive (à cause desquelles sa femme Lola doit se cacher et
son beau-père est déporté). « C'est une honte de vivre. Une honte de
marcher au soleil. » D'autres douleurs plus intimes affleurent, dont la
mort de son fils. Mais il dit aussi les éblouissements minuscules glanés
au fil des jours, tel le souvenir d'un figuier en Bretagne, ou la
beauté de l'automne. Il s'étonne : « La prodigalité de la nature est
stupéfiante. Les pépins dans une pomme, une orange, un melon : quelle
abondance superflue ! La coque d'une noix, quelle prudence ! Et le soin
exagéré que prend une noisette pour se protéger ! Un homme, même très
précautionneux, est malgré tout plus négligent qu'un fruit ou une
plante. » Les livres sont des compagnons qui l'aident à survivre, parmi
lesquels les diaristes français Jules Renard, André Gide ou Julien Green.
Reste qu'à l'issue de la guerre l'air de Budapest lui sera devenu
irrespirable. « Je suis envahi d'un tel mépris, maintenant que j'ai
découvert le véritable visage de la société hongroise, que je ne peux
plus en guérir. Il faut partir. » Ce sera l'exil, à partir de 1948, en Italie puis aux États-Unis. Il restera fidèle à la langue hongroise." La suite sur lepoint.fr
mardi 11 février 2020
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